Écrit par Les Réseaux du Parvis | |||
Dimanche, 11 Mars 2012 16:46 | |||
Economie et écologie
Quatre constats suscitent quatre interrogations fondamentales : 1. L’économie capitaliste qui gouverne le monde moderne est de plus en plus contaminée par la spéculation financière, qui a précipité la plupart des États dans une crise aux conséquences sociales dramatiques. Peut-on moraliser et réorienter le capitalisme, ou doit-on le considérer comme intrinsèquement pervers ? 2. Le mythe de la croissance illimitée sur lequel repose l’économie moderne engendre une pression insoutenable sur les ressources de la planète et des dégradations et pollutions de plus en plus graves. Comment gérer la contradiction entre la poursuite ou la relance de la croissance, présentées comme le remède à la crise, et l’impérieuse nécessité de sauvegarder pour les générations futures les biens communs que sont l’eau, l’air, les sols, la biodiversité, les matières premières… ? 3. En réaction aux graves désordres dus à la surexploitation de la planète, à la frénésie de la consommation et aux inégalités sociales croissantes, la conscience écologique, qui progresse dans l’opinion, nous invite à une profonde reconversion. Sommes-nous réellement prêts à transformer nos mentalités et comportements en vue d’une nouvelle forme de civilisation alliant sobriété et justice ? 4. Les principes qui fondent le capitalisme et, plus encore, les graves déséquilibres sociaux et écologiques qu’engendrent l’économie libérale et ses dérives sont un défi pour le christianisme. Comment les valeurs évangéliques de solidarité, paix, attention aux plus faibles, frugalité… peuvent-elles rejoindre et sous-tendre la conscience écologique ? 1/ Sur le premier thème, une réaction commune : non, on ne peut pas vraiment moraliser le capitalisme et lui faire confiance pour construire l’avenir. Ce capitalisme prédateur, qui « nous conduit dans le mur » et « se mord la queue », va-t-il imploser de lui-même ? Il faut promouvoir des solutions alternatives, à commencer par des mesures comme le RMA (revenu maximal admissible ou autorisé) visant à empêcher les profits indécents d’une minorité et, plus généralement, par l’établissement d’une gouvernance mondiale. Mais un véritable changement de cap ne peut être obtenu qu’en remplaçant l’esprit de compétition par la coopération, ce qui implique le développement de l’ « économie sociale et solidaire » sous toutes ses formes et d’expériences échappant aux circuits monétaires, comme les SEL : systèmes d’échanges locaux de services ou compétences. 2/ Sur le deuxième thème : difficultés d’un compromis entre la croissance et une économie de la sobriété. On ne peut pas revenir à l’autarcie domestique de jadis, mais la notion en vogue de « développement durable » est pleine d’ambiguïté. La « croissance indéfinie dans un monde fini » n’est plus possible. Les excès et gaspillages de notre société de consommation sont pointés du doigt. La question de la production agricole est au coeur de ces contradictions. Comment faire face aux besoins croissants de la population mondiale, qui dépassera sans doute les 9 milliards d’habitants en 2050 ? Les agriculteurs français, encadrés aujourd’hui par la « politique agricole commune » et par la FNSEA , sont prisonniers du système, notamment par le biais des remboursements, et ne sont ni encouragés, ni aidés à se reconvertir dans l’agriculture biologique. À l’échelle mondiale, l’exportation à bas prix des surplus alimentaires des pays développés ruine la petite agriculture paysanne en Afrique, où pourtant il serait urgent de promouvoir la souveraineté alimentaire des populations. L’indispensable défense de l’emploi passe par des initiatives allant à l’encontre des exigences éthiques ou écologiques. À Saint-Etienne, par exemple, les salariés de l’industrie d’armement se sont légitimement battus pour ne pas être réduits au chômage. Pour des raisons électoralistes, les hommes politiques hésitent à dénoncer les dangers qui menacent la planète et à agir en faveur de l’environnement. Il est clair cependant que la course à la croissance, en aggravant sans cesse les pressions sur les ressources communes et les inégalités sociales, est un ferment de violence. Le grand choc prévisible viendra-t-il de désordres écologiques irréparables ou de la révolte des pauvres ? L’espoir réside peut-être dans la large prise de conscience des périls chez les jeunes. L’école doit favoriser l’esprit d’équipe, la solidarité, l’éveil à la beauté Cette question des relations entre Évangile et écologie soulève au préalable le problème du rôle du christianisme et plus particulièrement des Églises chrétiennes par rapport au capitalisme. La pensée judéo-chrétienne a manifestement favorisé l’esprit d’entreprise et l’émergence de l’économie capitaliste. Il semble toutefois que la recommandation de Dieu dans la Genèse : « Emplissez la terre et soumettez-la » puisse être interprétée dans le sens de prendre soin de la création, plutôt que d’exercer une domination sur la nature. Il serait intéressant de considérer le point de vue des autres religions sur cette question des relations entre économie, écologie et spiritualité, et de collaborer à une position commune. En tout cas, l’Église catholique n’a pas fait preuve jusqu’à présent de beaucoup de hardiesse dans la dénonciation des excès du capitalisme et des pressions sur l’environnement. Un texte récent de la Conférence des évêques de France (La création au risque de l’environnement) apparaît bien timide à cet égard. Les protestants ont réagi plus vite et avec plus de conviction. En fait, on attend des paroles fortes et sans ambiguïté de la part du magistère catholique, mais elles ne viendront sans doute pas sans une incitation vigoureuse du peuple chrétien de base.
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Mise à jour le Dimanche, 29 Avril 2012 17:56 |
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