Cette initiative d’une partie des musulmans de France, telle qu’elle est présentée  dans le média en ligne : SaphirNews.com | Quotidien musulman d’actualité (voir larges extraits en annexe:sont  soulignés de rouge certains passages qui ont attiré plus particulièrement l’attention  de l’Observatoire Chrétien de la Laïcité) est  d’une extrême gravité car elle représente une avancée non négligeable des thèses identitaires et communautaristes.
L’analyse critique des laïques de cette décision et cette stratégie de certains musulmans ne doit surtout pas pas être reprise  dans l’esprit de pseudo laïcité qui est celui du FN et d’une partie de la  droite  qui fait feu de tout bois pourvu que se développe l’islamophobie des français. Notre position n’est donc pas plus anti musulmane que notre désaccord avec l’enseignement privé catholique ne l’est à l’égard  des catholiques.

                    L’Observatoire Chrétien de la Laïcité note plus particulièrement :

1°)  La responsabilité politique de l’Église catholique en France dans le développement de cette conception communautariste de l’enseignement et de l’Éducation Nationale. Il est en effet légitime que des musulmans profitent  des droits acquis grâce à la Loi Debré par l’Eglise catholique, droits qui sont à l’origine historique  d’une conception identitaire et communautariste de l’Education publique,   Les traditions séculaires de l’enseignement catholique en France  voilaient en partie ce risque si l’on ne  réfléchissait par au paradoxe de la Loi Debré qui permettait à la fois l’ouverture de chaque école sous  contrat à des enfants  de toute conviction et le respect du caractère propre de ces écoles. Or pour l’Eglise catholique le caractère propre a toujours été  d’essence  religieuse et son nouveau statut souligne ouvertement  la « fonction évangélisatrice » de l’enseignement catholique. Le  cardinal André Vingt trois est très clair  quand il déclare :« Le risque serait que l’Enseignement catholique soit réduit à être une branche quelconque du privé. L’Enseignement catholique est d’abord confessionnel »

2°) le non respect de la Loi Debré puisque ce sont désormais clairement  des fédérations nationales qui sont les interlocutrices des pouvoirs publics et non les  établissements eux mêmes ( contrairement à ce que prévoit la loi Debré). Or c’est encore l’Église catholique  qui a    renforcé le caractère centralisateur de ces rapports avec son nouveau statut qui donne les pleins pouvoirs à l’assemblée des évêques de France sur le plan national et aux évêques diocésain sur leur territoire diocésains

3°) l’idée fausse que l’école catholique est faite pour  former l’élite de la nation. Certes il y a des établissements qui prétendent avoir cette « vocation » anachronique, voire  réactionnaire, et l’assument  sans état  d ‘âme, mais pas tous, au contraire. On notera pourtant la proximité du langage tenu par les musulmans  qui se sont  exprimés (de l’UOIF  semble t il)  avec les thèses sur ce point très  claires de  l’Opus Dei , qui vise à former les cadres  catholiques de demain (dans le monde politique, social, culturel, économique dans une optique en général réactionnaire reprises par un certain nombre d ‘évêques

4°) L’aggravation du caractère religieux identitaire  des établissements sous  contrat. Les musulmans  qui  s’expriment dans cette annonce  soulignent que les élèves musulmans   n’ont pas leur place dans les établissements catholiques  mais  dans  des établissements musulmans. Que pensent ils  l’ enseignement public laïque ? La  réponse est prévisible…

 Il reste de nombreux  établissements catholiques qui  recevant des élèves dont les parents ont des convictions et des croyances variées sont assez souples sur le caractère obligatoire de l’enseignement religieux malgré l’obligation d’évangéliser  selon leur statut ecclésial.

 Or  dans cette position de l’enseignement privé musulman il est clair que seuls des musulmans sont appelés à aller  dans ces écoles ,sous  contrat, pour y pratiquer leur religion (sur ce point les établissements juifs fonctionnent  déjà ainsi) C’est dit  expressément. Les allusions à la pédagogie Montessori sont là pour faire passer la pilule. On trouve souvent le même argument « pédagogique »  chez certains défenseurs de l’école catholique considérant a priori l’enseignement public  comme inapte à toute ouverture en ces  domaines.Et c’est une grave déformation supplémentaire de la Loi Debré qui souligne l’obligation  d’ouverture des établissements sous contrat  à des enfants de toutes convictions . Peut on signer un contrat avec  des écoles qui semblent devoir fonctionner  comme des établissements intégristes catho …hors contrat?

Jean RIEDINGER au  nom d e l’Observatoire Chrétien de la laïcité.

68 rue de Babylone 75007 Paris

                                                                                                              **********
ANNEXE

La Fédération de l’enseignement privé musulman fait sa première rentrée

Rédigé par Huê Trinh Nguyên | Vendredi 19 Septembre 2014

À l’instar du Conseil scolaire de la Fédération protestante de France qui regroupe cinq établissements protestants sous contrat ou encore du Secrétariat général de l’enseignement catholique qui compte plus de 8 000 établissements, la Fédération nationale de l’enseignement privé musulman voit le jour, marquant l’ancrage de la future élite musulmane en France.

École privée musulmane : la panacée ? On pourrait le croire, à observer les nombreux appels aux dons qui fleurissent sur le Net pour financer tel ou tel projet d’école privée à référence islamique. Il faut dire que plusieurs facteurs ont contribué à cet engouement. 

La crise de confiance à l’égard du système scolaire, qui jette chaque année 140 000 jeunes sans diplôme à la sortie de l’école, s’est accentuée par la mise à distance des parents envers l’institution scolaire, notamment observable à travers la circulaire Chatel interdisant, depuis 2012, aux mères voilées d’accompagner les sorties scolaires, sous prétexte de l’argument de « neutralité religieuse ».

Plus loin dans l’Histoire : en privant l’accès aux établissements publics des vingtaines de filles refusant d’enlever leur foulard, la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux à l’école a donné un sacré coup de fouet à ceux qui avaient en tête d’ouvrir un établissement scolaire privé.

Hormis la Medersa Taalim oul-Islam, née en 1947 à l’île de la Réunion et sous contrat avec l’État depuis 1990, mais aussi le précurseur en métropole qu’est le collège-lycée La Réussite (Aubervilliers) créé en 2001, tous les autres établissements secondaires ont ouvert leurs portes à la suite des débats houleux sur l’« interdiction du port de signes religieux » : le lycée Averroès (Lille), en 2003 ; le collège-lycée al-Kindi (Décines), en 2007 ; le collège Éducation et savoir (Vitry-sur-Seine), en 2008 ; le collège-lycée Ibn Khaldoun (Marseille), en 2009 ; le collège Institut de formation de Saint-Quentin-en-Yvelines, en 2009 ; le collège EducActive (Villeneuve-Saint-Georges), en 2009.

Sur ces neuf établissements, cinq sont affiliés à l’Union des organisations islamiques de France (UOIF). Forts de leur expérience, quatre d’entre eux (Averroès, Al-Kindi, Éducation et savoir, Ibn Khaldoun) se sont regroupés ainsi que l’école primaire La Plume (Grenoble), qui existe depuis 13 ans, pour créer la toute nouvelle Fédération nationale de l’enseignement privé musulman.

L’école de l’excellence, avec un supplément d’âme musulman

Le 22 mars 2014 était officiellement lancée, sous l’égide de l’UOIF, la Fédération nationale de l’enseignement privé musulman (FNEM), devant un parterre de directeurs d’écoles, de responsables associatifs en charge de projets d’établissement privés, du staff dirigeant de l’UOIF, de responsables du bureau des cultes du ministère de l’Intérieur et de quelques journalistes.

« La première instance représentative de l’enseignement musulman en France » est née, déclare son président Makhlouf Mamèche, également directeur adjoint du lycée Averroès. La FNEM entend « œuvrer pour la promotion, la structuration et le développement des écoles et des établissements scolaires musulmans en France, mais aussi concourir pleinement au service public d’éducation français aux côtés de l’enseignement privé catholique, de l’enseignement privé juif, de l’enseignement privé laïque ».

« Ce qui m’a frappé dans la déclaration de la FNEM, ce sont d’abord les valeurs de la République, de la laïcité et le supplément d’âme musulman, note Bernard Godard, consultant sur les questions liées au culte musulman auprès du ministère de l’Intérieur. « C’est exactement la définition qu’on doit attendre des instances confessionnelles dans l’esprit de la loi Debré de 1959. » Les établissements privés musulmans sont « plus proches du modèle catholique, issu du XIXe siècle, qui est celle de l’école de l’excellence : former des élites », analyse Bernard Godard. « Le modèle juif est plus confessionnel : l’enseignement religieux est plus important dans les yeshivot. »

L’engagement des parents et des enseignants

Pour Makhlouf Mamèche, la mission de la FNEM se résume en trois points. « Premier point : être l’interlocuteur des établissements privés musulmans auprès des pouvoirs publics pour transmettre les demandes de signature de contrat d’association avec l’État. » Il est vrai que, pour l’heure, seuls trois établissements sont passés sous contrat avec l’État. « Deuxième point : mutualiser les expériences entre nous, échanger sur plusieurs plans (la formation, les programmes, le financement des établissements….). » Enfin, « orienter, accompagner les porteurs de projet pour ne pas tomber dans les mêmes erreurs qu’on avait pu commettre autrefois… ».

En juin dernier, la FNEM a ainsi organisé un premier séminaire de formation d’une journée auprès de 28 associations, sachant qu’une « quarantaine de projets » sont en cours. Une demande croissante de la part de familles musulmanes qui s’explique par « la réussite scolaire des établissements existants aujourd’hui comme Averroès et al-Kindi », avance M. Mamèche.

« La réussite d’Averroès est une alchimie très particulière : c’est la rencontre entre l’engagement des parents d’élèves et l’engagement des enseignants, qui depuis le début sont les fondateurs de l’établissement », explique Michel Soussan, ancien inspecteur de l’Éducation nationale dans l’académie du Nord et aujourd’hui plume et éminence grise de la FNEM. « C’est aussi le fait du climat particulier que porte l’ambiance musulmane, estime-t-il. Les enfants sont très respectueux, ils se comportent à l’école comme ils se comportent vis-à-vis de leur religion. »

Reste que leur nombre se situe bien en-deça de la demande. Compte tenu de l’histoire du pays, rappelons que plus de 8 300 établissements catholiques accueillent plus de 2 millions d’élèves, 280 établissements juifs scolarisent 30 000 élèves, alors que l’on compte une vingtaine d’établissements musulmans pour 2 000 élèves. Une pénurie… qui fait que les effectifs d’écoles privées catholiques peuvent parfois atteindre jusqu’à 90 % d’élèves musulmans selon les secteurs géographiques, estime le Secrétariat général de l’enseignement catholique.

Outre l’aspect quantitatif, le défi est aussi d’ordre pédagogique : quelques écoles musulmanes recherchent de plus en plus des enseignants formés aux pédagogies alternatives de type Montessori, qui entend favoriser la confiance en soi et l’initiative des enfants.

Aussi, bien que les établissements privés musulmans soient encore peu nombreux, la nouvelle FNEM compte bien jouer un rôle de premier plan tant auprès des pouvoirs publics que des porteurs de projets d’école. Makhlouf Mamèche en est convaincu : « Avant, les musulmans construisaient des mosquées. Aujourd’hui, l’éducation est le défi numéro un de notre communauté mais aussi de toute la société française. Qui dit éducation dit école, qui constitue le moyen d’éducation par excellence. »